Dans sa chronique du 23 mai 2012 sur le conflit étudiant, Nathalie Elgrably-Lévy se demande Pour qui se battent-ils?

Elle écrit: «Les seuls qui ont tout à gagner du statu quo, ce sont les ménages dont le revenu dépasse 65,000$ par année, car rien n’est prévu pour eux avec le nouveau régime, sinon une hausse des droits de scolarité de 82% en septembre. Quant à ceux dont le revenu est supérieur à 72,000 $ par an, ils verront en plus leur crédit d’impôt pour frais de scolarité diminuer de 20% à 16,5%.»

Pour qui se battent-ils? Excellente question. On pourrait aussi demander pourquoi? Depuis le début du conflit étudiant, les étudiants ont été instruments d'une lutte beaucoup plus ambitieuse: une vision d'une social-démocratie encore plus à gauche dans un Québec indépendant.

Avec le passage de la loi 78, le débat sur le conflit vient de basculer dans une toute autre direction: celle d'un changement législatif qui affecte les libertés individuelles et collectives de tous.

Mais, aujourd'hui, pourquoi les gens sont-ils dans la rue? Les manifestations contre la loi 78 sont-elles faites au nom de la liberté individuelle ou ne sont-elles rien d'autre qu'une extension du combat livré depuis le début du conflit étudiant?

Dans la rue, je suis prêt à parier que la majorité des manifestants sont présentement en faveur de la séparation. Pour Madame et Monsieur Tout-le-Monde, en familles reconstituées, surtaxés et essoufflés dans leur banlieue, la perspective d'un état qui donnerait plus aux autres en pigeant dans leur poche à eux n'est guère rassurante. Après leur journée de fou, entre le travail, la garderie et les bouchons de circulation ou de manifestants, ils n'ont qu'une seule envie: dormir.

Et, le problème, c'est que depuis quarante ans au Québec l'élément qui décide de tout dans les choix politiques finaux à l'urne est l'indépendance du Québec.

Imaginez un Québec qui ferait l'indépendance par la peau des dents, avec un résultat inverse à celui du référendum de 1995, en pleine crise économique. Ce sont ceux qui restent présentement chez eux qui seraient dans la rue. Il faudrait alors, pour maintenir l'Ordre, une autre loi restreignant la liberté d'expression et le droit de manifester.

La hausse des frais de scolarité est une chose, une social-démocratie plus à gauche une autre, l'indépendance du Québec également. La loi 78, encore une autre. En théorie. Parce que selon la couleur du carré, rouge, vert, jaune ou blanc, chacun pige parmi ces quatre éléments et les mélange à proportions différentes.

Moi je crains qu'à tout vouloir, et en même temps, on risque de se ramasser avec rien, sinon moins de liberté.

Vous connaissez la malédiction chinoise? Puissiez-vous vivre à une époque intéressante.

Pourquoi se battent-ils? Les capsules vidéo de La Boîte Rouge

Pourquoi se battent-ils? Je vous laisse visionner une sélection de clips diffusés sur le canal YouTube de La Boîte Rouge, «le média du mouvement étudiant».

Alors, on fait tous attention aux amalgames faciles, n'est-ce pas? D'un clip à l'autre, les vedettes et l'ancien étudiant de l'UQAM ne disent pas tous la même chose.